Afin de mieux comprendre comment le périnée est affecté par la position assise sur la selle, il est important d’en connaître l’anatomie.
La région communément appelée le périnée ou le plancher pelvien est en fait délimitée de chaque côté par les deux os des fesses (les ischions), le coccyx derrière et les os pubiens devant. Entre toutes ces structures osseuses se trouvent un ensemble de muscles nommés les muscles du plancher pelvien. Ces muscles, entrelacés de fascias, de ligaments et de tissus conjonctifs, viennent entourer les parties génitales (anus, vagin, urètre, pénis, testicules). Ils sont traversés par des vaisseaux sanguins et innervés par un nerf important, le nerf pudendal.
Les muscles du plancher pelvien jouent différents rôles :
La compression importante et directe provoquée par la position assise sur la selle crée une diminution de la circulation sanguine, comparable à un garrot, causant une hypoxie, soit une diminution de l’oxygénation des structures. Cette hypoxie peut causer un épaississement des tissus conjonctifs, des tensions musculaires et dans certains cas une compression et une irritation du nerf pudendal. Une vascularisation adéquate est importante pour le bon fonctionnement des muscles et des nerfs : pensez au garrot autour de votre bras lorsque vous faites prendre votre pression artérielle et que vous ressentez engourdissements, picotements, difficulté à bouger, jusqu’à ce que la compression soit retirée. C’est ce phénomène qui survient au niveau de votre périnée.
Un autre élément à considérer est le mouvement répété de flexion de la hanche dans une position inclinée du corps pouvant contribuer aux symptômes par étirement du nerf pudendal.
Conséquences :
L’étude de Schwarzer et al (2002) a étudié différents types de selles et leur impact sur l’apport sanguin au niveau du pénis.
Chez les hommes : Après seulement 20 minutes de vélo à un rythme visant 60-65% de la fréquence cardiaque maximale des cyclistes, ils ont observé une diminution entre 20,3% et 82,4% de l’oxygénation du pénis, selon le type de selles. Cela représente donc un impact majeur. Une selle trop étroite pour votre anatomie fessière aura tendance à créer davantage de compression sur votre plancher pelvien. La largeur des cuisses est également à considérer : une selle trop large augmentera la friction à l’intérieur des cuisses.
Chez les femmes : Une selle plus large est recommandée car le bassin féminin est naturellement plus large, les ischions plus écartés. Une selle adéquate à notre anatomie fait en sorte que le soutien se concentre au niveau des ischions et non pas au niveau du périnée. L’appui osseux vient alors décharger les tissus mous du périnée.
Celle-ci doit être adaptée à la morphologie, à la flexibilité et au style (performance versus randonnée récréative) de cyclisme pratiqué.
Il y a peu d’études sur le sujet, mais pédaler en danseuse sur son vélo 30 à 60 secondes à toutes les dix minutes est un bon début pour décomprimer le périnée et permettre de rétablir la vascularisation et l’oxygénation de la région périnéale.
Diminuer et même cesser le vélo temporairement peut s’avérer nécessaire dans certains cas où les symptômes sont persistants.
Vous pouvez opter pour un autre type d’entraînement (natation, marche, course) afin de maintenir votre condition physique tout en vous assurant de prendre les précautions requises telles que mentionnées dans cet article!
Investissez dans un chamois de qualité et suffisamment épais. Évitez de porter des sous-vêtements avec le cuissard : il faut réduire le plus possible la friction entre la région périnéale et la selle.
Il faut éviter de demeurer dans un vêtement humide. Prenez le temps de nettoyer le chamois avec un savon doux et de bien rincer à l’eau claire, et éviter les assouplisseurs, particulièrement pour la fragile région vulvaire.
Plusieurs baumes pour cyclistes sont disponibles en ligne ou en boutiques spécialisées. Appliqués aux différents points de friction soit les aines et les plis fessiers, ces baumes s’avèrent le plus souvent très efficaces pour les sorties de longue durée. Bien que leur fonction première soit de minimiser la friction, ceux-ci sont à proscrire en cas de lacération ou d’un problème connu d’infection à la région périnéale étant donné leur nature non-stérile.
En somme, ces huit conseils vont contribuer à prévenir voire éliminer les problèmes périnéaux chez le cycliste de tout niveau. Néanmoins, dans une deuxième partie, nous traiterons du rôle que peuvent avoir les professionnels de la physiothérapie concernant votre santé pelvienne. Entre-temps, ne laissez pas votre périnée mettre un frein sur vos élans mobilisateurs pour une meilleure santé physique!
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